Sous-sections

1.2 Étude de l'équation de la chaleur

\includegraphics[clip,width=0.8\textwidth]{CHAP1/barre1}

1.2.1 Problème physique: conduction dans une barre

Considérons le problème de la diffusion de la chaleur dans une barre homogène, de coefficient de conduction \bgroup\color{black}$ \lambda$\egroup , de masse volumique \bgroup\color{black}$ \rho$\egroup , de coefficient calorifique \bgroup\color{black}$ C_{p}$\egroup , de section \bgroup\color{black}$ S$\egroup et de longueur \bgroup\color{black}$ L$\egroup , sans production d'énergie interne \bgroup\color{black}$ .$\egroup En supposant que les deux extrémités sont maintenues à une température constante \bgroup\color{black}$ T_{0}$\egroup , l'équation de conservation de l'énergie s'écrit:

\bgroup\color{black}$\displaystyle \rho C_{p}S\frac{\partial T}{\partial t}-\lambda S\frac{\partial^{2}T}{\partial x^{2}}=0  $\egroup  pour \bgroup\color{black}$\displaystyle x\in[0,L]$\egroup

auquel on associe deux conditions aux limites \bgroup\color{black}$ T(0,t)=T_{0}$\egroup , \bgroup\color{black}$ T(L,t)=T_{0}$\egroup et une condition initiale \bgroup\color{black}$ T(x,t)=T_{i}(x)$\egroup .

1.2.2 Problème modèle

En effectuant le changement de variable \bgroup\color{black}$ u=T-T_{0}$\egroup , on obtient le problème modèle \bgroup\color{black}$ (P_{1})$\egroup suivant avec des conditions aux limites de type Dirichlet homogènes (c'est à dire que la valeur de \bgroup\color{black}$ u$\egroup est imposée égale à zéro aux extrémités \bgroup\color{black}$ x=0$\egroup et \bgroup\color{black}$ x=L$\egroup ):

$\displaystyle (P_{1})\left\{ \begin{array}{l} \frac{\partial u}{\partial t}=\ka...
...pour }t>0 u(x,0)=C(x) \mbox{}{pour }x\in\left[0,L\right]\end{array}\right.$ (1.1)

Dans cette équation \bgroup\color{black}$ \kappa=\frac{\lambda}{\rho C_{p}}$\egroup est la diffusivité thermique du matériau, \bgroup\color{black}$ u(x,t)$\egroup la température relative, et \bgroup\color{black}$ C(x)$\egroup la répartition de température relative initiale \bgroup\color{black}$ C(x)=T_{i}(x)-T_{0}$\egroup .


1.2.3 Recherche d'une solution analytique

Dans le but d'obtenir une solution de référence pour les simulations numériques, nous allons chercher une solution analytique du problème \bgroup\color{black}$ (P_{1})$\egroup , en utilisant la méthode classique de séparation de variables.

1.2.3.1 Méthode de séparation de variables

Pour résoudre \bgroup\color{black}$ (P_{1})$\egroup , on considère le problème sans condition initiale fixée:

$\displaystyle (P_{1}^{^{\prime}})\left\{ \begin{array}{l} \frac{\partial u}{\pa...
...ppa\frac{\partial^{2}u}{\partial x^{2}} u(0,t)=0 u(L,t)=0\end{array}\right.$ (1.2)

On cherche une solution élémentaire de ce problème \bgroup\color{black}$ (P_{1}^{^{\prime}})$\egroup sous la forme à variables séparées:

$\displaystyle u(x,t)=f(t)g(x)$ (1.3)

En substituant cette relation dans l'équation (1.2) on obtient:

$\displaystyle f^{^{\prime}}(t)g(x)=\kappa  f(t)g^{^{\prime\prime}}(x)$ (1.4)

En divisant par \bgroup\color{black}$ f(t)g(x)$\egroup , il vient:

$\displaystyle \frac{1}{\kappa}\frac{f^{^{\prime}}(t)}{f(t)}=\frac{g^{^{\prime\prime}}(x)}{g(x)}$ (1.5)

L'examen de l'équation (1.5) montre que le membre de gauche est une fonction de \bgroup\color{black}$ t$\egroup seulement, tandis que le membre de droite n'est fonction que de \bgroup\color{black}$ x.$\egroup Par conséquent si \bgroup\color{black}$ x$\egroup varie et \bgroup\color{black}$ t$\egroup reste constant, \bgroup\color{black}$ \frac{1}{\kappa}\frac{f^{^{\prime}}(t)}{f(t)}$\egroup reste constant. De même, si \bgroup\color{black}$ t$\egroup varie et \bgroup\color{black}$ x$\egroup reste constant \bgroup\color{black}$ \frac{g^{^{\prime\prime}}(x)}{g(x)}$\egroup reste aussi constant. Chacun de ces membres doit donc être constant, disons égale à \bgroup\color{black}$ \beta.$\egroup D'où les 2 équations:

$\displaystyle \frac{f^{^{\prime}}(t)}{f(t)}=\beta\kappa$ (1.6)
$\displaystyle \frac{g^{^{\prime\prime}}(x)}{g(x)}=\beta$ (1.7)

que l'on réécrit sous la forme:

$\displaystyle f^{^{\prime}}(t)-\beta\kappa f(t)=0$ (1.8)
$\displaystyle g^{^{\prime\prime}}(x)-\beta g(t)=0$ (1.9)

En intégrant l'équation pour \bgroup\color{black}$ f(t)$\egroup (1.8), il vient:

$\displaystyle f(t)=c_{1}e^{\beta\kappa t}$ (1.10)

Le signe de la constante \bgroup\color{black}$ \beta$\egroup donne l'évolution de la température au cours du temps (puisque \bgroup\color{black}$ \kappa>0$\egroup ). Si la constante \bgroup\color{black}$ \beta$\egroup est positive, la température croit exponentiellement, ce qui n'est physiquement pas acceptable. Par contre si la constante \bgroup\color{black}$ \beta$\egroup est négative, la température décroît exponentiellement, ce qui est à priori la solution à retenir. Nous envisagerons cependant les 2 cas, et nous montrerons que seul le second cas conduit à une solution non identiquement nulle.

En supposant \bgroup\color{black}$ \beta>0,$\egroup on pose \bgroup\color{black}$ \beta=\omega^{2}>0$\egroup ( \bgroup\color{black}$ \omega$\egroup est une constante arbitraire). En réécrivant l'équation pour \bgroup\color{black}$ g(x)$\egroup (1.9), on obtient :

$\displaystyle g^{^{\prime\prime}}(x)-\omega^{2}g(x)=0$ (1.11)

Cette équation (1.11) est une équation du second ordre homogène et à coefficients constants. Cherchons la solution sous la forme : \bgroup\color{black}$ g(x)=e^{mx}$\egroup . On obtient alors l'équation caractéristique : \bgroup\color{black}$ m^{2}-\omega^{2}=0,$\egroup qui fixe les valeurs possibles de \bgroup\color{black}$ m=\pm\omega$\egroup , d'où la solution \bgroup\color{black}$ g(x)$\egroup :

\bgroup\color{black}$\displaystyle g(x)=c_{1}^{^{\prime}}e^{\omega x}+c_{2}^{^{\prime}}e^{-\omega x}$\egroup

ou encore :

\bgroup\color{black}$\displaystyle g(x)=c_{2}ch(\omega x)+c_{3}sh(\omega x)$\egroup

La solution \bgroup\color{black}$ u(x,t)$\egroup de (1.2) de s'écrit alors :

\bgroup\color{black}$\displaystyle u(x,t)=e^{(\kappa\omega^{2}t)}\left[A  ch(\omega x)+B  sh(\omega x)\right]$\egroup

avec \bgroup\color{black}$ \omega,$\egroup \bgroup\color{black}$ A$\egroup et \bgroup\color{black}$ B$\egroup des constantes. On peut montrer sans difficulté que l'application des conditions aux limites du problème \bgroup\color{black}$ (P_{1})$\egroup conduit à \bgroup\color{black}$ A=B=0$\egroup et donc à une solution identiquement nulle.

En supposant maintenant \bgroup\color{black}$ \beta<0$\egroup , on pose \bgroup\color{black}$ \beta=-\omega^{2}<0$\egroup , et dans ce cas en suivant la même démarche que précédemment, on montre que la solution s'écrit :

\bgroup\color{black}$\displaystyle u(x,t)=e^{-(\kappa\omega^{2}t)}\left[A \cos(\omega x)+B \sin(\omega x)\right]$\egroup

L'application de la première condition aux limites \bgroup\color{black}$ u(0,t)=0$\egroup en \bgroup\color{black}$ x=0$\egroup donne :

\bgroup\color{black}$\displaystyle e^{-(\kappa\omega^{2}t)}\left[A+0\right]=0\Rightarrow A=0$\egroup

\bgroup\color{black}$ u(x,t)$\egroup s'écrit alors:

\bgroup\color{black}$\displaystyle u(x,t)=Be^{-(\kappa\omega^{2}t)}\sin(\omega x).$\egroup

L'application de la deuxième condition en \bgroup\color{black}$ x=L$\egroup implique :

\bgroup\color{black}$\displaystyle Be^{-(\kappa\omega^{2}t)}\sin(\omega L)=0$\egroup

Si on choisit \bgroup\color{black}$ B=0,$\egroup on retrouve une solution identiquement nulle. On suppose donc que \bgroup\color{black}$ B\neq0,$\egroup et nous obtenons puisque \bgroup\color{black}$ e^{-(\kappa\omega^{2}t)}$\egroup \bgroup\color{black}$ \neq0$\egroup :

\bgroup\color{black}$\displaystyle Be^{-(\kappa\omega^{2}t)}\sin(\omega L)=0\Rightarrow\sin(\omega L)=0\Rightarrow\omega L=n\pi$\egroup

Cette condition fixe les valeurs possibles de \bgroup\color{black}$ \omega$\egroup : \bgroup\color{black}$ \omega=\frac{n\pi}{L}$\egroup ( \bgroup\color{black}$ n\in Z).$\egroup

La solution de \bgroup\color{black}$ (P_{1}^{^{\prime}})$\egroup s'écrit:

$\displaystyle u(x,t)=Be^{-\kappa\left(\frac{n\pi}{L}\right)^{2}t}\sin\left(\frac{n\pi}{L}x\right)$ (1.12)

Pour chaque valeur de \bgroup\color{black}$ n$\egroup , nous avons donc une solution élémentaire dépend de \bgroup\color{black}$ n$\egroup et où \bgroup\color{black}$ B$\egroup est une constante arbitraire que l'on notera \bgroup\color{black}$ C_{n}$\egroup :

$\displaystyle u_{n}(x,t)=C_{n}e^{-\kappa\left(\frac{n\pi}{L}\right)^{2}t}\sin\left(\frac{n\pi}{L}x\right)$ (1.13)

Et suivant le principe de superposition, toute combinaison linéaire de solutions de la forme (1.13), est aussi solutionde \bgroup\color{black}$ (P_{1}^{^{\prime}})$\egroup (sous réserve de la convergence de la série). Les solutions générales de \bgroup\color{black}$ (P_{1}^{^{\prime}})$\egroup s'écrivent:
$\displaystyle u(x,t)$ $\displaystyle =$ $\displaystyle \sum\limits _{n=1}^{\infty}u_{n}(x,t)$ (1.14)
  $\displaystyle =$ $\displaystyle \sum\limits _{n=1}^{\infty}C_{n}e^{-\kappa\left(\frac{n\pi}{L}\right)^{2}t}\sin\left(\frac{n\pi}{L}x\right)$  

où les \bgroup\color{black}$ C_{n}$\egroup sont des constantes arbitraires. On constate que puisque l'on a fixé aucune condition initiale, le problème \bgroup\color{black}$ (P_{1}^{^{\prime}})$\egroup admet une infinité de solutions.

1.2.3.2 Solution générale vérifiant la condition initiale

Les solutions (1.14) satisfont l'équation et les conditions aux limites du problème \bgroup\color{black}$ (P_{1})$\egroup . Pour satisfaire la condition initiale ( \bgroup\color{black}$ u(x,0)=C(x)$\egroup ), nous devons avoir :

$\displaystyle \sum\limits _{n=1}^{\infty}C_{n}\sin\left(\frac{n\pi}{L}x\right)=C(x)$                   $\displaystyle 0\leq x\leq L$ (1.15)

Le problème revient maintenant à la détermination des \bgroup\color{black}$ C_{n}$\egroup de sorte que la série (1.15) converge vers \bgroup\color{black}$ C(x)$\egroup pour tout \bgroup\color{black}$ x\in[0,L]$\egroup . Pour calculer les constantes \bgroup\color{black}$ C_{n}$\egroup , on multiplie l'équation (1.15) par \bgroup\color{black}$ sin(\frac{k\pi}{L}x)$\egroup , et on intégre sur l'intervalle \bgroup\color{black}$ [0,L]$\egroup . En utilisant l'orthogonalité des fonctions sinus:

\bgroup\color{black}$\displaystyle \int_{0}^{L}\sin(\frac{n\pi}{L}x)\sin(\frac{k\pi}{L}x)  dx=\frac{L}{2}\delta_{k,n}$\egroup

on obtiens la valeur de \bgroup\color{black}$ C_{k}$\egroup

$\displaystyle C_{k}=\frac{2}{L}\int\limits _{0}^{L}C(x)\sin\left(\frac{k\pi}{L}x\right)dx$ (1.16)

Les \bgroup\color{black}$ C_{k}$\egroup sont les coefficients de Fourier de la fonction périodique de période \bgroup\color{black}$ 2L$\egroup coïncidant avec \bgroup\color{black}$ C(x)$\egroup sur l'intervalle \bgroup\color{black}$ [0,L]$\egroup .

La solution générale du problème $ \left(P_{1}\right)$ s'écrit:


$\displaystyle u(x,t)$ $\displaystyle =$ $\displaystyle \sum\limits _{n=1}^{\infty}C_{n}e^{-\kappa\left(\frac{n\pi}{L}\right)^{2}t}\sin\left(\frac{n\pi}{L}x\right)$ (1.17)
$\displaystyle C_{n}$ $\displaystyle =$ $\displaystyle \frac{2}{L}\int\limits _{0}^{L}C(y)\sin\left(\frac{n\pi}{L}y\right)dy$  

Dans le cas particulier \bgroup\color{black}$ C(x)=sin(n\frac{\pi x}{L})$\egroup , on trouve le mode propre (i.e. une solution qui évolue de façon auto-similaire au cours du temps) d'ordre \bgroup\color{black}$ n$\egroup du problème \bgroup\color{black}$ (P_{1})$\egroup :

$\displaystyle u(x,t)=sin(\frac{n\pi}{L}x)e^{-\kappa\left(\frac{n\pi}{L}\right)^{2}t}$ (1.18)

Ce mode propre décroît de façon auto-similaire et exponentiellement au cours du temps proportionnellement au carré de sa longueur d'onde \bgroup\color{black}$ \frac{L}{n\pi}$\egroup .

Cela montre qu'une fluctuation de température est d'autant plus amortie au cours du temps que sa longueur d'onde \bgroup\color{black}$ \frac{L}{n\pi}$\egroup est courte. C'est un phénomène caractéristique des processus de diffusion.


Pr. Marc BUFFAT
marc.buffat@univ-lyon1.fr
2008-04-07