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2.5 Formulation faible discrète

Nous avons vue qu'il existait plusieurs approches (travaux virtuels, Lagrange, approche formelle) pour obtenir la formulation faible d'une équation (ou système d'équations) aux dérivées partielles $Lu=f$.

Cette formulation faible peut s'écrire sous la forme symbolique:


\begin{displaymath}
\left\{ \begin{array}{c}
\mbox{Trouvez  }u\in V\\
a(u,v)=l(v)  \forall v\in V\end{array}\right.
\end{displaymath} (2.29)

$V$est l'espace des solutions, $a(u,v)$ la forme bilinéaire associée aux dérivées partielles de l'équation et $l(v)$la forme linéaire associée au second membre.

L'espace des solutions $V$ est un espace de fonctions (de dimension infinie), et la recherche d'une solution analytique de (3.29) dans cet espace n'est en générale pas possible.

On recherche donc une solution approchée $u^{h}$, en construisant une approximation $V^{h}$ de dimension finie $N$ de l'espace des solutions $V$. On se donne pour cela une famille libre de $N$ fonctions $\left\{ \Phi_{i}\right\} _{i=1,N}$ de $V$, et on construit l'espace vectoriel $V^{h}$ engendré par ces $N$ fonctions:


\begin{displaymath}
V^{h}=\left\{ v^{h}/v^{h}=\sum_{i=1}^{N}v_{i}\Phi_{i}\right\} \subset V\end{displaymath}

On cherche alors la solution de la formulation dans cette espace $V^{h}$, en résolvant le problème discret:


\begin{displaymath}
\left\{ \begin{array}{c}
\mbox{Trouvez  }u^{h}\in V^{h}\\
...
...{h},v^{h})=l(v^{h})  \forall v^{h}\in V^{h}\end{array}\right.\end{displaymath}

En décomposant la solution $u^{h}$ sur la base des fonctions $\Phi _{j}$


\begin{displaymath}
u^{h}=\sum_{j=1}^{N}u_{j}\Phi_{j}\end{displaymath}

et en prenant comme fonction test $v^{h}$ chacune des fonctions de base $\Phi _{i}$ (ce qui est équivalent), la formulation faible s'écrit, en tenant de la bilinéarité de $a(u,v)$


\begin{displaymath}
\sum_{j=1}^{N}a(\Phi_{j},\Phi_{i})  u_{j}=l(\Phi_{i})   \mbox{pour  }i=1,N\end{displaymath}

qui n'est autre qu'un système linéaire d'ordre $N$


\begin{displaymath}
\mathbf{A}U=B  \mbox{avec  }\mathbf{A}_{ij}=a(\Phi_{j},\P...
...,  U=\left\{ u_{i}\right\} ,  B=\left\{ l(\Phi_{i})\right\}
\end{displaymath} (2.30)

qu'il suffit de résoudre pour obtenir la solution approchée $u^{h}$.

Si le problème admet une formulation variationnelle, la solution $u^{h}$ minimise la fonctionnelle $J(v^{h})$ dans $V^{h}$:

\begin{eqnarray*}
J(u^{h}) & = & \frac{1}{2}\sum_{i=1}^{N}\sum_{j=1}^{N}u_{i}a(\...
...^{N}u_{i}l(\Phi_{i})\\
& = & \frac{1}{2}U^{t}\mathbf{A}U-UB^{t}\end{eqnarray*}


$J(u^{h})$ est une fonction quadratique de $N$ variables $\left\{ u_{i}\right\} $ , qui est minimum si le gradient de $J(u_{1},u_{2},..u_{N})$ par rapport à ces $N$ variables est nul. Or


\begin{displaymath}
\frac{\partial J}{\partial u_{i}}=\sum_{j=1}^{N}\mathbf{A}_{ij}U_{j}-B_{i}\end{displaymath}

et la condition de minimisation conduit alors au système linéaire (3.30).

La méthode des éléments finis n'est qu'une méthode particulière pour construire l'espace $V^{h}$ et les fonctions de base $\Phi _{i}$.

Pour terminer, nous allons donner quelques propriétés de la formulation faible discrète.

2.5.1 Traitement d'un exemple

Considérons le problème (3.23, 3.24) avec $f=1$.La solution analytique $u_{ex}$ est le polynôme du second degré:


\begin{displaymath}
u_{ex}(x)=\frac{1}{2}  x*(1-x)\end{displaymath}

La fonctionnelle $\mathcal{J}(u)$ de la formulation variationnelle (3.28) s'écrit:


\begin{displaymath}
\mathcal{J}(u)=\frac{1}{2}\int_{0}^{1}\left(\frac{\partial u}{\partial x}\right)^{2}dx-\int_{0}^{1}u  dx\end{displaymath}

et un calcul directe fournit:


\begin{displaymath}
\mathcal{J}(u_{ex})=-\frac{1}{24}\simeq-0.04167
\end{displaymath} (2.31)

Nous allons calculer une approximation de cette solution exacte sur une base de fonctions trigonométriques. Compte tenu des conditions aux limites et des propriétés de symétrie du problème par rapport à $x=1/2$, les fonctions choisies sont les fonctions de base $\Phi _{i}$ :


\begin{displaymath}
\Phi_{i}(x)=\sin \left((2i-1)\pi  x\right)\end{displaymath}

Et nous allons calculer la solution approchée $u^{h}$ en utilisant que deux fonctions de base $\Phi_{1}$ et $\Phi_{2}$


\begin{displaymath}
u^{h}(x)=a_{1}\Phi_{1}(x)+a_{2}\Phi_{2}(x)\end{displaymath}

On peut alors calculer $\mathcal{J}(u^{h})$ analytiquement (en utilisant Maple par exemple)


\begin{displaymath}
\mathcal{J}(u^{h})=\frac{1}{4} \pi^{2}a_{1}^{2}+\frac{9}{4} \pi^{2}a_{2}^{2}-\frac{2}{3} \frac{3a_{1}+a_{2}}{\pi}\end{displaymath}

Figure 3.3: fonctionnelle $J(u^{h})$
\includegraphics[scale=0.4]{CHAP2/jh}

Cette fonctionnelle est un paraboloıde de révolution (représenté sur la figure 3.3), dont le minimum est obtenu par résolution du système d'équations:


\begin{displaymath}
\frac{\partial\mathcal{J}(u^{h})}{\partial a_{1}}=0,  \frac{\partial\mathcal{J}(u^{h})}{\partial a_{2}}=0\end{displaymath}

Ces équations s'écrivent:


\begin{displaymath}
\frac{\pi^{2}}{2}a_{1}-\frac{2}{\pi}=0,  \frac{9\pi^{2}}{2}a_{2}-\frac{2}{3\pi}=0\end{displaymath}

Ces équations sont identiques à celles obtenues avec la formulation faible (3.26), en remplaçant la solution exacte $u$ par son approximation $u^{h}$, et les fonctions tests $v$ par les fonctions de base $\Phi_{1}$ et $\Phi_{2}$2.5. Ce système d'équations linéaires permet de déterminer les coefficients inconnus $\left\{ a_{i}\right\} $ .

La solution approchée $u^{h}$ s'écrit:


\begin{displaymath}
u^{h}(x)=\frac{4}{\pi^{3}}\sin(\pi x)+\frac{4}{27\pi^{3}}\sin(3\pi x)\end{displaymath}

Figure 3.4: solution approchée $u^{h}$ et erreur d'approximation $\vert u_{ex}-u^{h}\vert$
\includegraphics[scale=0.4]{CHAP2/uh}\includegraphics[scale=0.4]{CHAP2/errh}

On a tracé sur la figure 3.4 la solution approchée $u^{h}$ comparée à la solution exacte $u_{ex}$ , ainsi que l'erreur d'approximation $\vert u_{ex}-u^{h}\vert$. On constate sur la figure que l'on a une très bonne approximation de la solution, avec une erreur uniformément répartie (de l'ordre de $1\%$ maximum).

Pour cette solution approchée $u^{h}$, la valeur de la fonctionnelle $\mathcal{J}(u^{h})$ vaut:


\begin{displaymath}
\mathcal{J}(u^{h})=-\frac{328}{81\pi^{4}}\simeq-0.04157\end{displaymath}

qui est légèrement plus grande que la valeur exacte (3.31).

Nous allons maintenant montrer que la solution approchée $u^{h}$ calculée avec la formulation faible discrète est la meilleure approximation2.6 de la solution exacte $u_{ex}$ du problème dans l'espace d'approximation $V^{h}$ engendré par les fonctions de base $\Phi_{1}$ et $\Phi_{2}$.

Pour cela nous allons tout d'abord comparer $u^{h}$ à l'interpolation $u_{I}$ dans $V^{h}$de la solution exacte $u_{ex}$ aux 5 points d'interpolations $X=\left\{ 0,\frac{1}{4},\frac{1}{2},\frac{3}{4},1\right\} $. Cette interpolation de $u_{ex}$ s'écrit:


\begin{displaymath}
u_{I}(x)=b_{1}\Phi_{1}(x)+b_{2}\Phi_{2}(x)\end{displaymath}

et coıncide avec la solution exacte aux points d'interpolation $X_{i}$:

\begin{eqnarray*}
u_{I}(X_{i}) & = & u_{ex}(X_{i})   i=1,5\end{eqnarray*}


Compte tenu des propriétés de symétrie du problème, ces 5 relations ne donnent que 2 équations indépendantes;


\begin{displaymath}
\frac{\sqrt{2}}{2}b_{1}+\frac{\sqrt{2}}{2}b_{2}=\frac{3}{32}   \„     b_{1}-b_{2}=\frac{1}{8}\end{displaymath}

qui permettent la détermination unique des coefficients $b_{1}$ et $b_{2}$. L'interpolation $u_{I}$ s'écrit donc:


\begin{displaymath}
u_{I}(x)=\left(\frac{3\sqrt{2}}{64}+\frac{1}{16}\right)\Phi_{1}(x)+\left(\frac{3\sqrt{2}}{64}-\frac{1}{16}\right)\Phi_{2}(x)\end{displaymath}

Cette solution approxime bien la solution exacte $u_{ex}$, comme on peut le constater sur la figure 3.5, mais l'erreur d'interpolation est plus grande en moyenne que l'erreur d'approximation comme on le constate sur cette même figure.

Figure 3.5: solution interpolée $u_{I}$ et erreur d'interpolation $\vert u_{ex}-u_{I}\vert$
\includegraphics[scale=0.4]{CHAP2/ui}\includegraphics[scale=0.4]{CHAP2/erri}

Pour le vérifier, on calcule l'erreur moyenne (en norme $\mathcal{L}^{2}$):


\begin{displaymath}
\int_{0}^{1}(u_{I}-u_{ex})^{2}  dx\simeq0.1137 10^{-5}  ...
...,   \int_{0}^{1}(u^{h}-u_{ex})^{2}  dx\simeq0.0627 10^{-5}\end{displaymath}

et constate donc que l'erreur d'approximation est plus faible que l'erreur d'interpolation, et donc la solution $u^{h}$ est meilleure que l'interpolation $u_{I}$.

De façon plus générale, si l'on cherche la fonction $v^{h}$ de $V^{h}$ qui minimise l'erreur d'approximation (au sens de la norme $\mathcal{L}^{2}$):


\begin{displaymath}
err=\int_{0}^{1}(v^{h}-u_{ex})^{2}  dx\end{displaymath}

on retrouve l'approximation $u^{h}$.

De même, si l'on cherche la fonction $v^{h}$ de $V^{h}$ qui minimise l'erreur d'approximation (au sens de la norme associée à la fonctionnelle $\mathcal{J}$)


\begin{displaymath}
err=\int_{\Omega}\left(\frac{\partial}{\partial x}(v^{h}-u_{ex})\right)^{2}  dx\end{displaymath}

on retrouve encore l'approximation $u^{h}$. En fait la minimisation de cette erreur conduit à la formulation faible discrète, d'où le résultat.


Pr. Marc BUFFAT
marc.buffat@univ-lyon1.fr
2007-03-12